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dimanche 2 octobre 2016

LA VILLA JACOB : HOMMAGE ET RÉPARATION – LA VILLE DE NICE : HONNEUR À SERGE ET BEATE KLARSFLED


Avant le dévoilement...
(Photo ©Cathie Fidler)

Parfois, rien ne se passe pendant des mois qui vaille d'être publié sur ce blog, et d'autres fois les événements se catapultent, au point qu'il s'en passe plusieurs le même jour. 

C'est ce qui s'est produit le 29 septembre* dernier à Nice.
Pour ceux et celles qui n'ont pu y assister, nous allons tenter d'en faire le récit, en y ajoutant quelques précisions qui ne manqueront pas de vous intéresser. 

L’AMEJDAM était présente ce jour-là à la Villa Jacob, 32 avenue du Général Estienne. À juste titre, puisque la personne qui est à l’origine de cet événement, si important dans le cadre de notre travail de mémoire, est membre de notre association, ainsi que du Comité Yad Vashem : Mme  Catherine Bensoussan-Ambacher.

Ceux qui suivent ce blog savent bien le travail qui se fait en amont du jour où la plaque est posée en présence d’officiels bienveillants. Ils sont conscients des recherches et des hasards qui s'y rattachent. Dans ce cas précis, rien ne se serait produit sans la rencontre entre Catherine Bensoussan-Ambacher, médecin pédiatre à Vence, et Frédéric Lamasse, le papa de l'une de ses petites patientes, qui venait de faire une étrange trouvaille lors d'une séance de jogging. Ne sachant à qui d'autre s’adresser pour en parler (mais ignorant son implication dans le comité Yad Vashem), il en a fait part à Catherine Bensoussan-Ambacher, lui confiant ainsi un trésor de mémoire du passé. 

Dans une décharge sauvage de la forêt de la Sine, à Vence, il était tombé sur les débris d’une plaque qui comportait des lettres en hébreu et le nom de La Villa Jacob. Ces morceaux en piteux état, empilés les uns sur les autres, recouverts de feuillages et de saleté auraient très bien pu rester à jamais dans les oubliettes d’une poubelle à ciel ouvert. 








Photos © Catherine Bensoussan-Ambacher


Par chance, intrigué, il s’était adressé à la bonne personne, celle qui a su reconstituer le puzzle, sur les lieux même de la découverte, puis frapper aux bonnes portes, et enfin enclencher le processus officiel qui mènerait à cette pose de plaque – hélas en son absence, dont la date avait été programmée depuis longtemps – mais nous sommes heureux de pouvoir exprimer ici notre reconnaissance à Mme Catherine Bensoussan-Ambacher et, bien entendu, à Frédéric Lamasse. 


Puzzle initial (photo © C. Bensoussan-Ambacher)
Il est vraisemblable que cette plaque a été ôtée de
la façade de la Villa Jacob d'origine lors de sa 
démolition dans les années 80. Un nouveau foyer
pour personnes âgées a ensuite été construit sur le même
emplacement.  


La plaque d'origine, reconstituée, reposait au sol, 
tandis que sa copie neuve était dévoilée.
(Photo ©Cathie Fidler)

Toujours est-il que cette plaque était celle qui avait sans doute été posée après la guerre à la Villa Jacob, lieu qui était en 1943 « une maison de repos » juive. Une fois les sbires d’Aloïs Brunner en ville, nul doute que cette adresse de Cimiez leur fut facile à dénicher, et leur zèle mena, le 21 novembre 1943 à l’arrestation et à la déportation de quinze personnes, octogénaires pour la plupart. Marie Simon, une infirmière (non-juive) qui s’occupait de ces vieilles personnes et qui remplaçait provisoirement la directrice, refusa d’abandonner ses pensionnaires. Elle les accompagna jusqu’à Drancy, d’où ceux-ci furent déportés sans retour.





(Photos ©Michèle Merowka)

Parmi ces malheureux se trouvait l’arrière-grand-mère de Mme Dominique Boy-Mottard, élue niçoise, dont le discours émouvant, poignant, personnel, retraça le destin de cette aïeule, Flora Lattès, et l’impact que cette déportation eut sur sa propre histoire. Vous pouvez lire le détail de son beau discours sur son blog, en cliquant ici.



Pendant le discours de Mme Boy-Mottard
(Photo ©Cathie Fidler)

(Photo ©Michèle Merowka)


La nouvelle plaque a été dévoilée en présence de M. Christian Estrosi, de M. Philippe Pradal, maire de Nice, et de M. Eric Ciotti. Leurs discours successifs ont souligné l’importance du travail de mémoire, si bien mis en valeur dans les Alpes-Maritimes grâce, notamment, aux "voyages de la mémoire" qui permettent chaque année à des centaines d’élèves de se rendre à Auschwitz afin d’y prendre la mesure de ce que peut être l’horreur absolue lorsque des hommes fanatisés perdent toute leur humanité. Rappel utile, par les temps qui courent.    

La présence de Serge et Beate Klarsfeld a ajouté à la solennité de cette importante cérémonie. Ce couple d'exception était présent à Nice ce jour-là, non seulement en mémoire du père de Serge Klarsfeld qui y fut arrêté par les nazis le 29 septembre 1943, mais également pour y recevoir le titre de Citoyen d'Honneur de la Ville de Nice


Le graphisme de ce "diplôme" est dû au talent 
de l'artiste niçoise Sylvie T.  


(Photos ©Michèle Merowka)

Cette cérémonie s'est ensuite déroulée sous les plafonds décorés de la Villa Masséna, en présence d'une foule nombreuse et attentive. 
Après les discours officiels des élus, et avoir reçu de leurs mains ce précieux document, Serge Klarsfeld a, bien entendu, raconté d'une voix claire le détail de l'arrestation de son père. Cachés dans une armoire au double fond, Serge, sa sœur Tania et leur mère durent leur survie à sa clairvoyance, et à sa détermination. L'histoire est bien connue, nous ne la répéterons pas. Il suffit de consulter le volumineux ouvrage écrit à quatre mains par Serge et Beate pour en relire les détails : Mémoires (éd. Fayard-Flammarion).  

Beate a conclu la séance de discours avec la pertinence et modestie qu'on lui connaît. Son sourire radieux a ravi l'assistance. 


Beate Klarsfeld

Tania, Beate & Serge Klarsfeld
(Photos ©Michèle Merowka)

Il nous a également été précieux d'entendre, de la voix de cet homme que nous admirons tant, mention du travail laborieux de l'AMEJDAM, et de sa présidente, Mme Michèle Merowka. Cette reconnaissance publique nous a touchés ; nous lui en sommes infiniment reconnaissants. 


La cérémonie s'est terminée par un délicieux cocktail partagé dans la convivialité par une assemblée amicale, et unanime dans son admiration pour ce couple exceptionnel. En voici  une dernière image informelle. 



Beate & Serge Klarsfeld
(Photo ©Michèle Merowka)


Et, pour ceux qui n'ont pu assister à la cérémonie en mémoire de Shimon Peres, qui s'est tenue le même jour à 18:30, Allée Itzak Rabin dans les jardins de la Promenade du Paillon, voici le lien qui permet de voir le discours prononcé par M. Christian Estrosi à cette occasion. 
Et quelques clichés, que nous devons à la présence efficace d'un autre membre du bureau de l'AMEJDAM : notre trésorier, Serge Binsztok. 


  




 
La fanfare niçoise a joué l'hymne israélien 
et la Marseillaise avec son brio habituel. 

Pour finir ce billet, bref rappel d'une cérémonie de pose de plaques à Saint-Martin Vésubie. Celle-ci a eu lieu le dimanche 25 septembre, en mémoire des malheureux qui ont fui ce village où ils avaient été assignés à résidence par les autorités italiennes d'occupation, pour être ensuite arrêtés par les nazis une fois franchis cols et frontière, avec les tragiques conséquences que l'on sait. 


Photo ©Michèle Merowka

Il est important de souligner que c'est la toute première fois que des plaques ont été posées en un même lieu et le même jour pour honorer des victimes et des "Justes". 

Nous rappelons qu'en France, le village du Chambon-sur-Lignon, où aucune arrestation ni délation ne s'est produite pendant les années noires, fut le premier à obtenir la mention de "Village des Justes", et l'ensemble de ses habitants y ont ainsi été distingués.  

À présent de nombreuses communes ont rejoint un réseau qui regroupe les lieux où des "Justes" ont activement participé au sauvetage des Juifs. 

Bien avant Saint-Martin-Vésubie, et toujours dans les Alpes-Maritimes, cet honneur a été attribué, grâce à Zoë David, son maire, au petit village de Saint-Léger** dont les habitants ont caché et hébergé une vingtaine de Juifs, en partageant avec eux – sans réclamer  la moindre compensation financière – leurs cartes d'alimentation, et sans qu'aucun de leurs protégés soit jamais dénoncé, ni arrêté. Beuil pourrait être également distingué, nous en avons retracé l'histoire sur ce même blog il n'y a pas si longtemps. 

L'Amejdam, quant à elle, continue son travail de fourmi qui vise à honorer les jeunes victimes. Du nouveau pour bientôt, donc ne nous quittez pas !


~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~


POUR APPROFONDIR : 

*Les détails plus officiels concernant cette journée et les titres de leurs acteurs peuvent être consultés sur ce site
** Si vous souhaitez en savoir davantage au sujet de Saint-Léger, vous pouvez lire un article publié en son temps dans la revue "Los Muestros", dirigée par le regretté Mpïse Rahmani, en cliquant ici, et en allant à la page 32. ("Un souvenir bien caché")



Texte et mise en page de ce billet : Cathie Fidler

4 commentaires:

  1. Grande richesse d'informations sur cette grande journée ! Je vous remercie d'avoir mis un lien vers mon blog. Toutefois, pour arriver précisément vers l'article concernant mon arrière-grand-mère, il est préférable de mettre précisément le lien vers le billet :
    https://boymottard.wordpress.com/2016/09/29/elle-sappelait-flora-lattes-et-elle-vivait-a-la-villa-jacob/

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  2. Merci à vous. Le lien est rectifié dans le billet.

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  3. J'espère que Beuil sera distingué comme il le mérite. Nous sommes plusieurs à y travailler.

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  4. Fidèle lecteur de votre blog, je suis admirative des actions entrepris par Amejdam pour honorer la mémoire et oeuvrer pour la justice. Merci infiniment!

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