Ceci est notre logo

Ceci est notre logo

vendredi 25 mars 2016

SIMONE VEIL, UNE GRANDE DAME, UN DESTIN HORS DU COMMUN…


Nous vous avons déjà présenté plusieurs membres d’honneur de notre association : Georges Loinger, Serge et Beate Klarsfeld, Charles Gottlieb, Boris Cyrulnik, aujourd’hui nous vous parlerons d’une très grande dame, Simone Veil. 



UN PARCOURS EXEMPLAIRE

Simone Jacob est née à Nice le 13 juillet 1927, elle y a grandi. Comme ses sœurs, Madeleine (Milou) et Denise, elle a été scolarisée au Lycée de jeunes filles, devenu plus tard le Lycée Calmette ; les établissements scolaires n’étant pas mixtes, son frère a été scolarisé au Lycée du Parc Impérial.
C’est aussi de Nice qu’elle a été déportée, avec sa famille. Elle a survécu à Auschwitz et à la « marche de la mort » avec l’une de ses sœurs, Milou.
Son père, sa mère et son frère ont été assassinés.  


© Centre de Documentation Juive de la Shoah - Mémorial de la Shoah


Denise, sa deuxième sœur, a été arrêtée à Lyon et déportée à Ravensbrück le 26 juillet 1944, elle est libérée en avril 1945.  
Denise n’a pas subi le traitement réservé aux internés dits "raciaux". Auréolé de la gloire des combattants, son retour de captivité s’est effectué dans des conditions très différentes.

Magistrat, secrétaire générale du conseil supérieur de la magistrature, Simone Veil entre en politique en 1974, en devenant la ministre de la Santé du gouvernement de Jacques Chirac. C’est à ce poste que, le 17 janvier 1975, elle fait voter la loi sur l’IVG, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing.

Elle reste au gouvernement jusqu’en 1979, puis devient la première présidente du Parlement européen où elle siège entre 1979 et 1982. Nommée ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville de 1993 à 1995,  elle est membre du Conseil constitutionnel de 1998 à 2007.
Voilà pour ce qui est de la carrière de Madame Simone Veil, la personne politique préférée des Français.


En ce qui concerne sa vie privée : elle épouse Antoine Veil, en 1946, avec qui elle a eu trois fils. Jean, en 1947, Nicolas, en 1948 (décédé en 2002), Pierre-François, en 1954. La famille fut, tout au long de sa vie, son port d'attache. En 2013, elle a eu la douleur de perdre, à un mois d’intervalle, sa sœur Denise et son mari Antoine.


UNE PAROLE DIGNE ET PRÉCIEUSE

Aujourd’hui, nous vous parlerons de la jeune Niçoise, de l’ancienne déportée, de la première présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et de la grande dame qui m’a accordé un entretien, le 17 Février 1998, dans son bureau ministériel, situé près des Invalides. Je voudrais vous faire partager quelques confidences qu’elle m’a faites... 

Bien sûr, je l’ai interrogée sur sa vie de déportée, sur son silence si long après la guerre et sur sa volonté de transmettre la mémoire de l’indicible, selon le mot de Primo Levi :

Je suis née à Nice et j’y suis très attachée. J’ai le souvenir de mes classes, du jardin d’enfants à la philo, mais aussi le souvenir de la tendresse et des personnes qui nous ont aidées. C’était très important, mais chacun a son propre vécu : j’ai eu la même enfance que ma sœur, Denise ; nous sommes très proches et nous sommes liées par les souvenirs que nous avons de notre enfance ; ma sœur n’a pas été arrêtée à Nice, elle a été arrêtée dans la Résistance et elle n’habitait plus Nice, mais pendant des années, elle ne souhaitait pas y revenir alors que moi, je reste très attachée à Nice. Après la guerre et maintenant, j’ai tout le temps envie d’y aller.

J’y ai encore beaucoup de connaissances. Je suis heureuse d’y retrouver mes souvenirs d’enfance qui transcendent et dépassent cette période-là ; je recherche tous mes souvenirs et logiquement, les souvenirs heureux. Ma sœur pendant très longtemps n’a pas supporté. Ma sœur aînée, arrêtée en même temps que moi et qui est morte peu de temps après la guerre, était aussi heureuse d’y retrouver des amis.

Chacun porte en soi sa propre souffrance. C’est un sentiment forcément très personnel. Je suis très frappée par la différence de réaction sur toutes ces questions, entre ceux qui ont eux-mêmes été déportés et ceux dont la famille a été déportée ; parfois ils étaient déportés ensemble, et certains membres de ces familles ne sont pas rentrés. Je crois que nous avons une vision qui vient de nos sentiments, de ce que nous pensions sur place et cela nous amène à voir les choses très différemment. (...)

Les Justes de France pensaient avoir simplement traversé l’Histoire. En réalité, ils l’ont écrite. De toutes les voix de la guerre, leurs voix étaient celles que l’on entendait le moins, à peine un murmure, qu’il fallait souvent solliciter. Il était temps que nous les entendions. Il était temps que nous leur exprimions notre reconnaissance.

HOMMAGE AUX JUSTES DE FRANCE

Le 18 janvier 2007 au cours de la Cérémonie au Panthéon en hommage aux Justes de France, avec son ami le Président Jacques Chirac, qui fut le premier président français à reconnaître le rôle de Vichy dans la déportation des Juifs de France, elle incarne la reconnaissance de la France :

Vous tous, les Justes de France auxquels nous rendons hommage aujourd’hui, vous illustrez l’honneur de notre pays qui, grâce à vous, a retrouvé le sens de la fraternité, de la justice et du courage. Voilà plus de soixante ans, vous n’avez pas hésité à mettre en péril la sécurité de vos proches, à risquer la prison et même la déportation. Pourquoi ? Pour qui ? Pour des hommes, des femmes et des enfants que, le plus souvent, vous ne connaissiez même pas, qui ne vous étaient rien, seulement des hommes, des femmes et des enfants en danger. (...)

ACCUEILLIE SOUS LA COUPOLE


En mars 2010, elle entre à l'Académie française. Ici, avec son mari Antoine. (Reuters)

Image empruntée ici

Une dame exceptionnelle était à l’honneur et notre cœur vibrait en suivant les images de son entrée sous la Coupole… Élue à l'Académie française, le 20 novembre 2008, Simone Veil y a été reçue le 18 mars 2010.

Sur son épée d’académicienne, sont gravés les symboles de ce que fut sa vie : les flammes, le chiffre 7865, marque indélébile sur son bras, et Birkenau, le nom du camp, rappellent sa déportation.  Les devises "Liberté, Egalité, Fraternité", et "Unie dans la diversité", symbolisent son engagement politique, en France et en Europe. Le visage souriant d’une femme marque son attachement à cette cause.

Beaucoup, en France et au-delà, voudraient vous avoir, selon leur âge, pour confidente, pour amie, pour mère, peut-être pour femme de leur vie. ces rêves d'enfant, les membres de notre Compagnie les partagent à leur tour. Aussi ont-ils choisi de vous prendre à jamais comme consœur. Je baisse la voix, on pourrait nous entendre: comme l'immense majorité des Français, nous vous aimons, Madame. Soyez la bienvenue au fauteuil de Racine qui parlait si bien de l'amour. 

Jean d'Ormesson


UN LIEN FORT AVEC LA VILLE DE NICE


Dévoilement de plaques au lycée du Parc Impérial et à l’école Saint-Philippe.
16 octobre 2007


Lycée du Parc Impérial, 16 octobre 2007
Francine Monod, Simone Veil, Denise Vernay et Micheline Jacob
© Michèle Merowka

En 2007, nous avons proposé à Simone Veil et à sa sœur Denise Vernay de dévoiler une plaque sur laquelle seraient inscrits le nom de leur frère Jean, avec ceux de dix condisciples déportés. À leur demande, deux cérémonies ont été réalisées le même jour, l’une au Parc Impérial et l’autre à l’Ecole Saint-Philippe, où était scolarisé leur cousin François, le jeune frère de Francine et Micheline Jacob, déporté avec ses parents.
Les quatre cousines tenaient à être ensemble pour ce retour sur les lieux de leur enfance, au cours d’une journée lourde de souvenirs douloureux.


Simone Veil et Elie Wiesel à Nice, une rencontre mémorable.
Jeudi 7 mai 2009

Inauguration de la bibliothèque du Centre Jean Kling.
Alain Sebbah, responsable de la bibliothèque recevait Simone Veil, qui a accepté que son nom soit donné à la Bibliothèque du centre culturel juif de Nice. Cérémonie faite dans une intimité relative, mais les personnalités de toute tendance politique étaient présentes.

Ce même jour, Élie Wiesel donne son nom à la Maison du Judaïsme.
Il donne une conférence au CUM, « Leçon de vie et d’espoir » en présence de Simone Veil.




©Michèle Merowka

Citoyenne d’honneur de la ville de Nice
30 octobre 2013. 

Inauguration de l’avenue Simone Veil dans les quartiers ouest de Nice

Le 4 novembre 2013, en présence de ses fils, Pierre-François et Jean Veil, et des élèves d'une classe de troisième du collège voisin Jules-Romains.


Image empruntée ici


CONCLUSION


Image empruntée ici

Comment peut-on se sentir si proche d’une femme aussi extraordinaire, et pourtant accessible et chaleureuse ? Je me souviendrai toujours de son accueil dans le grand bureau ministériel. En quelques secondes Madame la Ministre s’est transformée, elle a quitté son impressionnant bureau pour parler de ce qui lui tenait tant à cœur : Nice, les membres de sa famille assassinés, la transmission de la Mémoire, la plaque sur laquelle est désormais inscrit le nom de son frère comme une ultime et symbolique tombe.

Merci, Madame Simone Veil, pour tout ce que vous avez fait pour les femmes, pour la mémoire des Juifs déportés, des Justes qui leur ont tendu la main, et merci de m’avoir reçue et d’avoir accepté d’ouvrir un peu votre cœur. 


Bibliographie :

Trois livres lui sont entièrement consacrés :
Maurice SZAFRAN, Simone Veil, Destin, Éditions Flammarion, 1996
Simone VEIL, Une vie, Editions Stock, 2007
Sarah BRIAND, Simone Veil, Éditions Fayard, 2015

Le Magazine Marianne lui a consacré un Hors-Série intitulé, Simone Veil, un destin français, en mars 2016.


Texte: Michèle Merowka
Mise en page: Jacques Lefebvre-Linetzky



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire