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vendredi 8 mars 2019

VICTOR YOUNG PEREZ CHAMPION






Ce billet de blog rend hommage à deux hommes et à une famille. 
Le premier de ces hommes est un boxeur juif Tunisien, Victor "Young" Perez, qui a péri à Auschwitz. Le second est celui qui l'a sorti de l'ombre grâce à ses recherches - il s'agit d'André Nahum, médecin à Sarcelles. André Nahum a passé de nombreuses années de sa vie à reconstituer la biographie de ce jeune boxeur qui fut le premier Juif champion du monde poids-mouches de boxe. Son livre est magnifique et intéressant à plusieurs égards: culturel, historique et biographique.



André Nahum, (1921-2015) © Éditions Télémaque
Image empruntée ici

Enfin, il faut saluer le travail entrepris par la fille d'André Nahum, Maya, gardienne de l'œuvre de son père et celui de la petite-fille de l'écrivain, Sophie, réalisatrice d'un documentaire original consacré à Victor Young Perez.




Victor Young Perez (1911-1945)
Image empruntée ici

Chronologie

Naissance de Victor Young Perez (Messaoud Hai Victor Perez) le 18 octobre 1911.
Champion de France des poids-mouches le 11 juin 1930.
Champion du Monde des poids-mouches le 26 octobre 1931.
Relation amoureuse avec Mireille Balin, la femme fatale du cinéma français des années trente. 
Perte du titre de Champion du Monde le 31 octobre 1932.
Dépenses immodérées, prise de poids et manque d'entraînement s'en suivent.
Défaite contre l'Autrichien Ernst Weiss à Berlin le 11 novembre 1938 au lendemain de la Nuit de Cristal.
Dénoncé et arrêté par la Milice le 21 septembre 1943.
Déporté en direction d'Auschwitz, convoi n°60, le 7 octobre 1943.
Forcé de livrer des combats de boxe à l'intérieur du camp.
Assassiné le 22 janvier 1945 lors de la Marche de la Mort. 

La chronique de Cathie Fidler (extraits)


Image empruntée ici



"Dès les premiers chapitres, nous pénétrons dans le monde juif tunisien. Nous humons la nourriture qui cuit dans la cuisine de la mère de Victor Younki – futur champion -, et nous y reconnaissons la toute-puissance, et l’amour absolu pour ses enfants, de la mère de famille ; nous nous promenons dans les rues du quartier où vit la famille Perez ; nous faisons connaissance de tous ces personnages colorés et pittoresques qui exercent de petits métiers pour nourrir des familles très nombreuses, et très pieuses. Nous découvrons les différents quartiers, où vivent des communautés qui ne se mélangent pas vraiment, et la fierté de ce jeune sportif qui fait coudre une étoile de David sur sa culotte de combat – triste prémonition de la suite de l’Histoire.

Nous comprenons bien la fierté qu’éprouve toute cette communauté, à travers ce qu’en dit la mère du héros, lorsqu’il décide de se faire appeler Young Perez : "On n’est pas américains ! Avant on s’appelait comme des Juifs, après il fallait s’appeler comme des Français, même votre père se fait appeler René, et maintenant on devient américain ? Vous allez me rendre folle ! "

Pourtant, ce n'est pas facile d'être juif en Tunisie après la guerre de 14, dans laquelle les Juifs tunisiens n'ont pas pu s'engager, n'étant pas français, mais tunisiens... À cause de cela , ils seront l'objet d'un véritable pogrom. 
L’Histoire commence à marquer notre héros. L’Histoire, dont on devine qu’elle va le rattraper, et le broyer.

C’est là une histoire triste, émouvante, mais également édifiante, que nous raconte André Nahum. Son livre, magnifiquement documenté, est un ouvrage précieux."

Pour découvrir l'entretien qu'André Nahum a accordé à Cathie Fidler, cliquez ici

Pour lire l’intégralité du billet de blog de Cathie Fidler consacré à Victor Young Perez, cliquez ici.


Un film contesté : Victor Young Perez
Jacques Ouaniche, 2013 


Image empruntée ici

Avec Brahim Asloun dans le rôle-titre (Champion Olympique à Sydney en 2000 et champion du monde WBA en décembre 2007, poids mi-mouches.

Le 20 novembre 2013, Maya Nahum a signé l'article Victor Young Perez, un détournement de boxe,  publié par Causeur. Elle a fustigé une réécriture de "l’histoire du champion juif tunisien assassiné à Auschwitz".

" Le film tient tout entier dans le dernier combat de Young contre un allemand à Auschwitz. Une séquence très longue, où le boxeur Brahim Asloum donne le meilleur de lui-même. Asloum fait le boulot comme personne, il boxe. Le choix de faire jouer Young Perez par Brahim Asloum, champion du monde comme lui est la grande trouvaille du réalisateur. Sinon ? Quoi de la Hara de Tunis dans les années 20 ? De l’ambiance décrite pourtant dans tellement d’ouvrages (très bizarre, l’accent parisien des copains de Young dans les ruelles du ghetto ! L’accent tune, c’est quand même typique). Quoi du Paris des années 30 que Young va découvrir dans sa nouvelle vie de champion ? (Quelle lourdeur, cette scène censée nous montrer ses conquêtes, où l’on voit Young dans le tourniquet d’un palace au bras d’une nouvelle femme à chaque sortie du tourniquet !) Quoi de son retour triomphal à Tunis, en héros, retour pourtant historique ? De l’accueil national ? De la fierté de la Hara ? De la générosité légendaire de Young pour son ghetto ? Rien. Pourquoi le choix de cette actrice qui joue Mireille avec un fort accent italien ? Pourquoi son frère Benjamin à Auschwitz alors que dans la réalité, il était à Tunis et n’a jamais été déporté ? (Cette invention donne lieu à des scènes de mélo fraternel digne d’un soap-opera !) Parce que c’est de la fiction ? Et que la fiction a tous les droits ? C’est vrai. Mais notre droit est d’écrire que le Young du film n’a pas grand-chose à voir avec le vrai Young Perez. La production n’avait pas les droits du livre d’André Nahum (il les a vendus à un autre producteur). Or comment écrire l’histoire de Young en ignorant le seul récit existant, de crainte d’être accusé de plagiat ? Pas d’autre choix que de suivre la trame de ce récit, mais en le vidant de sa substance, en inventant des anecdotes, en changeant même l’histoire de Benjamin, mais aussi en transformant l’Histoire."


Un film documentaire, Young et moi, Tomer Sisley sur les traces du boxeur d'Auschwitz, Sophie Nahum, 2014.



Crédit : Facebook/Young et Moi sur les traces du boxeur d'Auschwitz
Image empruntée ici

Tomer Sisley rêvait de réaliser un film sur Victor Young Perez, il avait même commencé l’écriture d’un film inspiré de la vie du champion et désirait rencontrer les derniers témoins de sa vie. Le film ne s’est pas fait, mais un nouveau projet est né grâce à sa rencontre avec Sophie Nahum, réalisatrice. Elle décide d’inclure Tomer dans un documentaire consacré à Victor Young Perez afin de sensibiliser les plus jeunes aux horreurs de la Shoah. La réalisatrice et l’acteur sont partis à la recherche de celles et ceux qui ont connu Victor Perez et ils ont également pu s’entretenir avec des survivants d’Auschwitz dont le journaliste Noah Klieger, récemment disparu. Ce film est dédié aux grands-parents de la réalisatrice.




Young Perez Champion, de Tunis à Auschwitz, son histoire, extraits du livre d'André Nahum :

« Les deux garçons grimpent sur le ring, pressés de gagner. Ils se battent sous les encouragements des copains, de maître Mossé et de Joe Guez. Comme un vrai match. Quatre reprises plus tard, grâce à sa souplesse et à son jeu de jambes, Victor domine son adversaire et remporte le nom de Young sous les applaudissements. (…)
De retour chez eux, ils déclinent fièrement à leurs parents leurs nouvelles identités, ce qui déclenche une tempête chez la douce Khmaïssa.
-       On aura tout vu, mes garçons ne veulent plus porter leurs noms ! Benjamin et Victor c’est pas bien ? D’où ça sort ce Kid et ce Young ?
-       C’est comme les Américains, maman !
-       Mais on n’est pas américains ! Avant on s’appelait comme des Juifs, après il fallait s’appeler comme des Français, même votre père se fait appeler René et à présent on devient américains ? Vous allez me rendre folle ! » p.38.

« À la deuxième reprise, Young repart en trombe et multiplie les coups. Un droite-gauche à la pointe du menton fait basculer puis chuter Genaro, qui tente de se relever mais retombe, inerte, quand l’arbitre arrive à huit.
-       Neuf ! Dix ! Out ! annonce l’arbitre.
Young regarde son adversaire à terre. Il comprend qu’il a gagné. Par K.O., en moins de deux reprises. C’est impossible. Il lève les bras en l’air et hurle sa victoire. » p. 74.

« L’adversaire de Young était un garde du camp, un militaire plus grand, plus fort et surtout bien mieux nourri que lui. Il avait autrefois boxé en amateur dans les poids moyens. Le combat, arbitré par un SS, débuta à la tombée de la nuit et se déroula sous la lumière des projecteurs.
Cette scène semblait à la fois irréelle et burlesque. Insoutenable en tout cas.
Assis dans son coin sur un tabouret, comme autrefois lorsqu’il était un homme libre, l’ex-champion du monde, auquel le jeune Paul Steinberg fit office de soigneur à sa demande, se prêta à cette comédie. Énergie du désespoir ? Pied de nez à ses cruels bourreaux ? Pourquoi Younkie avait-il accepté cette caricature de combat ? Avait-il le choix de refuser ? Sûrement pas. » 
p. 160.

Young Perez Champion, de Tunis à Auschwitz, son histoire, André Nahum, éditions SW Télémaque, 2013.


Une bande dessinée




À l’ombre de la gloire (Futuropolis, 2012), récit de Denis Lapière illustré par Aude Samama qui s’inspire des vies de Young Perez et de Mireille Balin. Notez l’hommage de l’illustratrice au peintre, Max Beckmann.


Le podcast sur RCN 89.3



Pour écouter le podcast, c'est ici

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Mise en page: Jacques Lefebvre-Linetzky





1 commentaire:

  1. Merci Jacques.
    Il m'était totalement inconnu.
    Bises à vous deux. AlainZ

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