"Moins on a de connaissances,
plus on a de
convictions."
Certitudes, doute et vérité, quelques éléments de réponse apportés
par la philosophie
Le penseur de Rodin
Image empruntée ici
"Avoir des
certitudes c'est tenir pour vrai quelque chose sans remettre en question ce que
l'on affirme parce qu'on y adhère entièrement, pleinement.
Quand on dit «j'en ai la
certitude» on veut bien dire qu'on n'en doute pas, on tient pour assuré ce que
l'on dit ou ce que l'on sait.
La certitude renvoie au
domaine de la vérité, des connaissances assurées, c'est-à-dire fondées et
prouvées. Quand on parle de la «certitude d'un fait» on parle d'un fait avéré,
validé par l'expérience, un fait que l'on ne pourrait nier. Chercher la
certitude peut renvoyer à une exigence rationnelle, celle de tout esprit qui a
soif de connaissances véritables et solides, rejetant toute opinion empruntée
et mal fondée, toute connaissance reçue naïvement sans qu'on ait pris la peine
ou qu'on ait fait l'effort de la remettre en question.
Seulement, il peut y avoir
différents degrés ou types de certitude : de la certitude la plus
rationnellement prouvée et établie à celle qui est reçue de manière aveugle et
crédule et qui peut renvoyer à tout ce que l'on tient pour vrai sur fond d'une
ignorance, à tout ce que l'on croit savoir sur un mode assuré et dogmatique. Si
on se réfère au langage courant : quand on dit de quelqu'un qu'il «a trop de certitudes»
on indique par là un défaut, le défaut d'un esprit non pas qui recherche la certitude
au sens d'une vérité définitive et indubitable, mais qui porte des jugements
trop hâtifs et qui est le plus souvent dans le préjugé, des préjugés qu'il ne
remet jamais en question et auxquels il accorde un caractère certain de manière
présomptueuse et dogmatique. Toute la question est de savoir de quelle nature
est cette adhésion.
Dans ce sens là, la
certitude ne doit pas faire l'objet d'une recherche, mais d'un doute ou d'une
remise en question.
Si la certitude marque
l'assurance d'un esprit qui ne doute pas et ne craint pas l'erreur, cette
assurance peut très bien n'être que le fruit d'une intuition et d'une adhésion
trop crédule alors peu objective et peu justifiable, ce qui revient alors à se
demander s'il faut toujours chercher la certitude et dans quelle mesure? Car
toute certitude est-elle bonne à rechercher ? »
Source : Claire Marin, professeur de
philosophie, voir lien ici
La connaissance désigne un rapport de la pensée à la
réalité extérieure et engage la notion de vérité comme adéquation de l'esprit
et de la chose. Par extension, le terme connaissance désigne le contenu de la
pensée qui correspond à la nature de la chose visée, et s'oppose à erreur ou
illusion. Ses caractères sont l'universalité et la nécessité, ce qui suppose de
réfléchir sur la méthode propre à nous faire parvenir à la connaissance. En ce
sens, elle est plus qu'une croyance partagée puisque son universalité est de
droit ; de même elle diffère de l'opinion dans la mesure où elle est une
opinion vraie, « accompagnée de raison » (Platon).
Encyclopédie Universalis
"Il existe en
réalité deux formes d’ignorance qu’on pourrait qualifier de
« nouvelle », mais qui sont diamétralement opposées. La première
ouvre et libère, la seconde emprisonne et tue. La première, qu’il faut
célébrer, se traduit par de nouvelles interrogations suscitées par de nouvelles
découvertes. Elle est le moteur de toutes les avancées du savoir. La seconde
fait au contraire vivre dans l’illusion qu’on sait alors qu’on ne sait pas et
s’apparente à ce que Platon appelait « la double ignorance »."
Thomas de
Koninck, philosophe
On dit souvent d’Internet que c’est une fenêtre
ouverte sur le monde et c’est en effet la principale source d’information de
nombreux jeunes de par le monde. Internet est souvent utilisé comme outil de
référence. En tant que tel, il affirme une « vérité » qui est
amplifiée par la rapidité de propagation et l’accessibilité de l’outil. Il
s’appuie sur des images, des vidéos et des témoignages divers qui constituent
une sous-culture. Cette sous-culture, dont le socle est fragile, revendique le
droit à remettre en question ce qui est communément admis ou ce qui appartient à
une culture traditionnelle fondée sur la recherche, la vérification et le
croisement des sources, par exemple. De fenêtre du monde, Internet devient le
miroir des certitudes et des préjugés. À l’école, le discours du professeur est
contesté et la sous-culture devient l’étendard de l’ignorance. Il est donc essentiel
de réagir avec des outils pédagogiques. Comprendre, analyser, évaluer, vérifier
sont des compétences indispensables pour décrypter aussi bien les contenus
explicites que ceux qui se dissimulent derrière une argumentation fallacieuse.
Quels
outils sont à notre disposition ?
La vérification par les
faits (en anglais fact checking)
désigne une méthode consistant à vérifier et valider l’exactitude des chiffres,
des informations et des
affirmations non factuelles énoncés dans un texte ou un discours.
Cette méthode s’applique
le plus souvent aux déclarations des hommes politiques, et de plus en plus à
celles des experts (en économie, santé publique, environnement, sociologie, etc.) et de manière générale aux partenaires sociaux. Il s'agit
souvent d'affirmations émises par des personnalités à la radio, à la
télévision, dans des discours publics, ou d'affirmations publiées dans des
rapports, des périodiques, et dont la véracité ou l'exactitude pourraient être
mises en doute.
Ce travail de vérification
est facilité par la consultation des bases de données officielles,
de l'Internet sourcé et de certains réseaux collaboratifs. Il
nécessite des connaissances générales et la capacité d'effectuer des recherches
rapides et précises, mais ne peut se limiter aux sources d'information en ligne : dans certains
domaines, une partie des sources adéquates ne figure pas sur l'Internet.
La vérification croisée (ou recoupement) et le sourçage pratiqués dans Wikipedia et d'autres wikis sont une forme collaborative de vérification
par les faits.
Source : Wikipedia, lien ici
Eduscol, Informer et accompagner les professionnels
de l’éducation. Déconstruire la désinformation et les théories
conspirationnistes.
Hoax, rumeurs, photos ou vidéos truquées… les fausses
informations abondent sur internet. Parfois la désinformation va plus loin, et
prend la forme de pseudo-théories à l’apparence scientifique qui vous mettent
en garde : "On te manipule !" À en croire ces "théoriciens"
du complot, États, institutions et médias déploieraient des efforts
systématiques pour tromper et manipuler les citoyens. Il faudrait ne croire
personne… sauf ceux qui portent ces thèses complotistes ! Étrange, non ? Et si
ceux qui dénoncent la manipulation étaient eux-mêmes en train de nous manipuler
? Oui, #OnTeManipule quand on invente des complots, quand on désigne des boucs
émissaires, et quand on demande d’y croire, sans aucune preuve. Découvrez les
bons réflexes à avoir pour garder son sens critique et prendre du recul par
rapport aux informations qui circulent.
Lien ici
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StopIntox est un projet global d’éducation populaire
aux médias et à l’Internet. Un kit pédagogique d’un nouveau genre qui allie la
vidéo, la formation, la conférence et Internet pour agir contre les préjugés,
les théories du complot et les fractures qui morcèlent la population française.
Ces films sont la base de notre action, car plus que
tout discours, la vidéo parle aux jeunes. Conçus et réalisés avec humour et
malice pour être facilement accessibles à tous, ils sont diffusés en mode viral
sur Internet, mais servent aussi d’outils pédagogiques innovants pour les
enseignants et les adultes référents.
Le site rassemble l’ensemble des contenus vidéo, et
développe la démarche citoyenne et pédagogique. C’est un lieu de référence et
une base de données pour tous ceux qui cherchent les moyens d’agir pour
déconstruire les préjugés et les intox.
Source: StopIntox
Source: StopIntox
Un entretien avec le journaliste John Paul Lepers sur
France Inter, le 2 novembre 2016 dans le cadre de l’émission, L’instant M,
Dorothée Barba.
Pour écouter l'émission, cliquez ici
Image empruntée ici
Pour écouter l'émission, cliquez ici
L’uchronie
L'uchronie
est une évocation imaginaire dans le temps. « Uchronie » est un néologisme du
XIXe siècle fondé sur le modèle d’utopie, avec un « u », négatif et « chronos »
(temps) : étymologiquement, le mot désigne donc un « non-temps », un temps qui
n’existe pas.
En
littérature, c'est un genre qui repose sur le principe de la réécriture de
l’Histoire à partir de la modification d’un événement du passé. On utilise
également l’expression « histoire alternative » (alternate history) ou histoire
contrefactuelle. Lorsqu’elle est associée à des moyens techniques qui
permettent de remonter dans le temps et donc de modifier le passé, l’uchronie
est directement associée au genre de la science-fiction.
L’auteur
d’une uchronie prend comme point de départ une situation historique existante
et en modifie l’issue pour ensuite imaginer les différentes conséquences
possibles. À partir d’un événement modifié, l’auteur crée un effet domino
(terme anglo-saxon couramment utilisé : effet papillon) qui influe sur le cours
de l’Histoire.
Source, canalblog : lien ici
Pour prolonger cette réflexion, vous pouvez lire ce roman de Philip Roth, publié chez Folio (traduction de Josée Kamoun).
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Pour prolonger cette réflexion, vous pouvez lire ce roman de Philip Roth, publié chez Folio (traduction de Josée Kamoun).
Extrait :
"C'est la
peur qui préside à ces Mémoires, une peur perpétuelle. Certes, il n'y a pas
d'enfance sans terreurs, mais tout de même : aurais-je été aussi craintif si
nous n'avions pas eu Lindbergh pour président, ou si je n'étais pas né dans une
famille juive?
Lorsqu'en juin 1940 survint le premier
choc avec la convention républicaine de Philadelphie, qui se choisit pour
candidat à la présidence le héros américain et aviateur mondialement connu
Charles A. Lindbergh, mon père avait trente-neuf ans. Agent d'assurances, il
avait quitté l'école à la fin de la quatrième, et gagnait un peu moins de
cinquante dollars par semaine, de quoi assurer le quotidien sans trop de
superflu. Ma mère qui, n'ayant pu s'inscrire faute de moyens à l'école
d'institutrices au sortir du lycée, avait fait du secrétariat quand elle vivait
encore chez ses parents; au plus noir de la Crise, elle nous avait épargné le
sentiment de la pauvreté, gérant la paie que mon père lui rapportait le
vendredi soir avec la même efficacité qu'elle mettait dans la tenue du ménage;
elle avait trente-six ans. Mon frère Sandy, jeune prodige du dessin, avait
douze ans et il était en cinquième; quant à moi, au cours élémentaire deuxième
année avec un trimestre d'avance, j'étais philatéliste en herbe, inspiré comme
des millions de gosses de mon âge par le plus éminent d'entre eux, le président
Roosevelt. J'avais sept ans."
Texte et mise en page de ce billet : Jacques Lefebvre-Linetzky
Texte et mise en page de ce billet : Jacques Lefebvre-Linetzky
Thank you, Jacques, for providing this excellent compendium. Even if education – especially civic education – is plainly failing in practically all countries with democratic institutions, it is encouraging to know that in France generations of young lycéens have been taught, not what to think but how.
RépondreSupprimerNow, I am asking myself how your compilation could be disseminated as widely as possible. I, a man of few convictions, am convinced that it could provide a basis for designing a precious instructional tool, one that can be used both in educational establishments and for the edification of the public, especially during the run-up to elections, when it is so important that voters should take informed decisions that take proper account of the general interest and are grounded in more than tribalism and prejudices.
Merci, Jacques, de nous avoir fourni cet excellent recueil. Malgré l’échec trop évident de l’éducation – surtout l’éducation civique – dans presque tous les pays dotés d’institutions démocratiques, il est réconfortant de savoir qu’en France des générations de lycéens aient été formés (et non pas formatés) à l’usage de la pensée critique.
Je me demande maintenant par quels moyens il serait possible d’assurer à ce compendium une diffusion maximale, car, tout en étant un homme de convictions peu nombreuses, je suis convaincu que celui-ci puisse servir de base pour la conception d’un instrument pédagogique, non seulement à l’usage des établissements scolaires, mais du grand public ; instrument qui pourrait s’avérer précieux, surtout en période pré-électorale, afin d’aider les citoyens à prendre des décisions bien réfléchis et qui tiennent compte de l’intérêt général, au-delà des préjugés personnels et tribaux.
Brillant article.Bravo Jacques.
RépondreSupprimerTout ceci reste tres inquietant.